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Les leviers de gestion de la carie du blé

Chapô

Dans des systèmes en agriculture biologique, la prévention et l’observation sont essentielles pour produire des cultures saines. Une rotation diversifiée constitue la base pour prévenir les maladies des plantes. 

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Photo de carie du blé
Contenus

En observant ses cultures à intervalles réguliers, on peut anticiper certains problèmes ou du moins agir à temps pour limiter les dégâts.

Semences saines

La semence étant le principal vecteur de la carie, il est essentiel de veiller à l’état sanitaire des semences.

Pour la semence certifiée non-traitée, le seuil de contamination réglementaire en France est de 0 spore/gramme. Des dérogations à ce seuil peuvent être données certaines années en fonction des conditions climatiques.

Pour les semences fermières nous conseillons de :

  • Bien observer vos parcelles au moment de l’épiaison afin de pouvoir intervenir rapidement en cas de contamination

  • Faire analyser vos semences par un laboratoire pour détecter la présence de carie

  • Traiter vos semences tous les ans ou en fonction de l’analyse du lot en question

  • Repartir sur de la semence indemne (semence certifiée ou résultat d’analyse négatif) lorsque la situation sanitaire devient trop difficile à gérer. Cette dernière option est peu applicable dans le cas des semences paysannes*, lorsque l’objectif est de maintenir une population de blé adaptée localement.

 

*Semences paysannes : il s’agit de variétés-population sélectionnées, multipliées et produites à la ferme. Gérées en individuel ou en collectif, elles sont un moyen d’aller vers plus d’autonomie et souveraineté semencière. L’objectif est généralement de multiplier une population au sein d’une ferme ou d’une région pour lui permettre de s’adapter progressivement aux conditions locales. L’avènement d’un épisode de carie peut s’avérer particulièrement problématique dans ce contexte, car il peut contraindre à repartir d’une semence qui n’a pas co-évolué avec la ferme en question et à recommencer un travail de sélection et d’adaptation.


Traitements préventifs

Se reporter à la page Traitement des semences

 

Choix de l’espèce et de la variété

Comme le montre le schéma ci-dessous, le degré de sensibilité des céréales à la carie varie selon l’espèce, le blé tendre étant parmi les plus sensibles. Seules l’avoine et l'orge sont considérées résistantes. Sur le seigle, la carie n'a été observée que très rarement, et ce dans des conditions expérimentales. Situé entre le blé tendre et le seigle, les variétés de triticale sont plus ou moins sensibles.
 

Schéma carie du blé : espèces sensibles

A ce jour il n’existe aucune variété de blé complètement résistante à la carie. Cependant le degré de sensibilité est connu pour certaines variétés comme le montre le schéma ci-dessous :

Schéma carie du blé : variétés sensibles

Favoriser une levée rapide

Le champignon responsable de la carie commune est capable de pénétrer dans une plantule de blé dans une fenetre bien définie entre la germination et le stade 3 feuilles (voir rubrique : « la carie c’est quoi ? »). Il se développera ensuite dans les tissus végétaux. Favoriser une levée et un developpement rapides des plantules réduit donc les possibilités pour le champignon d’infecter les plantes et de se propager. Les semis dans des conditions les plus favorables possibles à la levée réduisent le risque de carie.

Cependant, il n’est pas facile de prédire exactement ce qui favorisera une levée rapide d’un lieu et d’une année à l’autre. Certains agriculteurs pratiquent des semis précoces et/ou peu profonds.

Rotation

Une rotation diversifiée est un principe de base pour la prévention de maladies des plantes en agriculture biologique. Plus les cultures de céréales sensibles seront rapprochées dans la rotation, plus le risque de carie sera élevé.

Travail du sol

Les spores de carie ont besoin d’oxygène et d’eau pour germer. Les sols tassés gênent donc sa germination.

Lorsque le sol d’une parcelle est contaminé, un labour profond la première année de l’infection enfouit les spores, défavorisant l’infection des plantules l’année suivante. Cependant, un autre labour profond ramenera les spores à la surface. Aussi, les spores enfouies, ne trouvant pas l’oxygène nécessaire à la germination, se conservent. L’inoculum présent dans le sol ne se dégrade donc pas.
A l’inverse, la grande majorité des spores restées en surface germent dans les 2 à 4 mois suivant la récolte d’un blé carié, à condition que le sol soit suffisament humide. Aussi, des colemboles présents dans les premiers centimètres de sol ingèrent et détruisent des spores (Borgen, 2001). Afin de favoriser autant que possible la dégradation des spores, il peut alors être préférable de retarder le labour et de ne travailler le sol qu’en hiver ou au printemps qui suit la moisson pour semer une culture de printemps.

En cas de labour, il est conseillé d'attendre 5 labours avant de cultiver des céréales sensibles sur les parcelles cariées. Pour les systèmes sans labour, en l'absence de connaissances plus précises sur la biologie des spores, il semble prudent d'attendre 5 ans pour cultiver à nouveau une céréale sensible.

Observation de la culture

L’observation régulière de la culture permet de détecter la carie à temps afin de prendre des mesures pour limiter les dégats, par exemple en éliminant les pieds cariés. Les symptômes visibles au champ sont décrits dans la rubrique « symptômes et détection ». L’observation est d’autant plus importante si il s’agit d’une production de semences.

Récolte en dernier des parcelles concernées

Si le choix est fait de récolter une culture malgré une contamination, les parcelles sur lesquelles on a observé de la carie sont à récolter en dernier, après les parcelles saines afin d’éviter toute contamination. Penser ensuite à purger le matériel de récolte avec une culture résistante à la carie.

Nettoyage des matériels de récolte

Les spores de carie peuvent être transmises par le matériel de récolte. Une étude danoise (Kristensen & Borgen, 2001) conclue qu’après la récolte d’un champ contaminé, il faut remplir et vider une moissoneuse batteuse 4 fois avec de la semence saine pour atteindre un taux de contamination acceptable. Lorsqu’une moissoneuse a servi pour une parcelle carié, ou qu’on ne connaît pas l’état du dernier champ récolté (matériel partagé, entrepreneur), il est préférable de d’abord moissonner les productions de grain, et les productions de semences à la fin.

Attention aussi à la propreté d’autres équipements utilisés lors de la récolte : silos, big-bags, etc.

Destruction de la récolte

Lorsqu’un lot de blé carié est récolté, l’odeur de poisson pourri dégagée peut rendre le lot impropre à la consommation, il est alors refusé en meunerie et dans l’alimentation animale. De le détruire évite de conserver, voir propager, une source d’inocculum sur la ferme.
Lorsqu’une contamination significative est constatée au champ, la destruction sur pied est parfois préférable afin d’éviter la dissémination des spores au battage : malgré la perturbation pour le fonctionnement du sol, le brûlage sur pied (qui nécessite une autorisation préfectorale) peut alors être envisagé (précédé d’un fauchage s’il provoque peu de poussière et donc de dissémination des spores). Il est également possible de broyer la culture sur place, sachent que dans tous les cas la parcelle doit être considérée comme infectée.

Au moins 5 ans avant de recultiver une céréale sensible

Lorsque la carie est apparue dans une parcelle, on peut considérer que le sol est contaminé. La persistance des spores dans le sol dépend fortement des conditions dans le sol. Une survie de plus de 10 ans a été observée en conditons expérimentales (Johnson, 1990), mais en règle générale il suffit d’attendre 5 ans pour resemer une céréale sensible au champ.